Dans son Traité du détachement, Maître Eckhart affirme la supérioritédu détachement par opposition àl'humilité, la miséricorde et l'amour. Censérendre possible l'atteinte d'un état de béatitude « immanente », le détachement peut nous sembler rompre avec de la théologie scolaire, constituer ou bien une idiosyncrasie eckhartienne, ou bien un emprunt àla « mystique nuptiale ». On pourrait ainsi être tentéde croire que le détachement constitue une alternative aux vertus chrétiennes traditionnelles, morales ou théologales : un rejet des premières, dans la mesure oùelles nous permettent d'agir dans le monde créé, et un dépassement des secondes dans la mesure oùsa pratique semble rendre superflues la foi et l'espérance. Il s'agira pour nous de montrer qu'il faut plutôt voir dans le détachement l'expression la plus pure de l'amour christique, qui inclut en son sein toutes les vertus (morales et théologales) sous une forme absolument pure.