Si, ironiquement, certains énoncés de Nietzsche font encore l'objet de tentatives d'appropriation régulières par l'extrême droite, cela a permis aux commentateurs et interprètes de son œuvre de clarifier ces mêmes énoncés, et, du même coup, d'apporter un éclairage important sur les mécanismes populistes contemporains. Toutefois leurs diagnostics tendent à confirmer une crise institutionnelle dont le radicalisme ne serait que la manifestation la plus retentissante.
Je vais tenter lors de cette présentation de suivre les différentes interprétations contemporaines du concept de “ressentiment”, pour montrer en quoi le conspirationnisme apparaît comme une résurgence d'anciennes conceptions morales. Avec Deleuze et Guattari, nous détaillerons la logique accusatoire et essentialisante du ressentiment. Nous questionnerons l'idée d'une “ère de la post-vérité” à partir d'un article de Patrick Wotling. Enfin, nous suivrons une idée maîtresse de l'œuvre de Barbara Stiegler en faisant l'hypothèse que le conspirationnisme contemporain et les nouvelles conceptions politiques libérales - dont les discours et les techniques de gestion ont dominé durant la pandémie - relèvent de la même logique discursive.
Je confronterai alors cette hypothèse aux conclusions du rapport de recherche sur le mouvement conspirationniste au Québec (Juin 2022) publié par la Chaire UNESCO en prévention de la radicalisation et de l'extrémisme violent.
Finalement, à la suite d'une discussion avec d'autres chercheuses et chercheurs de la Chaire je proposerai des évaluations épistémiques, morales, politiques et pathologiques du conspirationnisme et des nouvelles manifestations du ressentiment : que signifient-ils pour notre Époque ? En terminant, je suggérerai quelques pistes d'action pour s'attaquer aux enjeux signalés.