Après la Révolution française, opposer une liberté des Anciens à une liberté des Modernes est devenue pratique courante chez les penseurs de tradition libérale, notamment depuis le célèbre discours de Benjamin Constant, De la liberté des Anciens comparée à celle des Modernes. Dans son article paru en 1836, « Etat social et politique de la France avant et depuis 1789 », Tocqueville propose une distinction entre la liberté démocratique et la liberté aristocratique, seule comparaison quelque peu systématique de ces deux types de liberté que l'on peut trouver dans toute son œuvre. Cette distinction correspond-elle à celle énoncée par Constant dans son discours de 1819? Dans quelle mesure, et surtout, dans quelles limites? Nous tenterons de répondre à ces questions en analysant la définition de la liberté démocratique proposée par Tocqueville dans son article de 1836 et en la comparant à celle de Constant. Cette recherche nous permettra aussi de constater que, bien que les deux penseurs proposent des définitions de la liberté moderne qui semblent au premier abord similaires, ils en tirent des conséquences politiques différentes, notamment en ce qui a trait à la souveraineté du peuple.