Un bref regard sur l'histoire de l'éthique, en particulier à l'époque moderne puis contemporaine, montre que cette dimension de la réflexion humaine, comme partie prenante de la philosophie pratique, a encore de nos jours une forte tendance à regarder les questions du point de vue de l'acteur individuel, qu'on l'appelle sujet ou personne. Cela se voit bien quand Henry Sidgwick distingue les tâches respectives de l'éthique et de la politique (The Methods of Ethics, 7è édition, p. 2-4), ou quand Sartre réfléchit à la mauvaise foi. Sans aucune référence à ces auteurs, ce sont de fait les enjeux de consommation et de loisirs qui viennent à l'avant plan quand il est question d'environnement. Et à notre époque nous voyons l'éco-anxiété se déployer, pas seulement chez les jeunes, alors que des stratégies d'évasion diverses se déploient. Le fardeau de la responsabilité semble placé sur les épaules individuelles, notamment eu égard aux changements climatiques, comme plusieurs l'ont souligné dont M.E. Mann (The New Climate Wars, 2021); un tel fardeau est impossible à porter d'autant que les responsabilités sont largement partagées. En effet, le caractère profondément social, historique, économique et politique de nos problèmes environnementaux demande une considération renouvelée des composantes culturelles en ce qui a trait aux enjeux environnementaux. Cette piste pourrait permettre de recadrer la réflexion et l'intervention en éthique de l'environnement, du moins ce sera l'hypothèse explorée ici. Pour l'expliciter davantage, si nous revenons au sens premier de la réflexion éthique qui consiste à se demander, pour simplifier, que faire, ou mieux: quelle est la bonne action, quelle est l'action appropriée, quelle est l'action juste ou correcte, une première exploration montrera que la personne individuelle a encore beaucoup de possibilités d'action, une fois que nous laissons de côté une conception trop individualiste et culpabilisante de l'éthique.