Argumentaire de l'appel à communicationDécloisonner la philosophie! Cette année, on change ! Le congrès annuel de la Société de philosophie du Québec (SPQ) innove en se tenant au mois de juin, après la fin des cours au collégial, en dehors du congrès habituel de l'ACFAS. Cette décision résulte d'une volonté des membres de rassembler l'ensemble de la communauté philosophique autour d'un nouvel événement, qui se veut un moment privilégié de partage, de connaissances et de rencontres. Premier décloisonnement donc, et non des moindres. À cette occasion, la SPQ se donne pour thème de réflexion « décloisonner la philosophie ». Elle propose de tourner nos regards vers la philosophie telle qu'elle s'incarne à l'extérieur du cadre traditionnel de l'université et du cadre occidental. Avant d'être un domaine de recherche académique, la philosophie a d'abord été une pratique motivée par la quête de sagesse, dont les bienfaits devaient se manifester concrètement dans nos vies. Au-delà des développements théoriques internes à la discipline, comment la philosophie, au 21e siècle, fait-elle son chemin au-dehors? Quelles sont les nouvelles mues du philosopher de nos jours ? « Décloisonner la philosophie! » Voilà donc un thème pour penser en dehors de la boîte. En fait, aujourd'hui, qui fait de la philosophie ? Une partie importante des philosophes pratique la discipline désormais dans les cégeps, et contribue à l'éducation intellectuelle des futur∙e∙s citoyen∙ne∙s. La philosophie pour enfants et adolescent∙e∙s se déploie maintenant jusque dans les écoles primaires et secondaires. La philosophie de l'éducation, pour sa part, éclaire la formation des futur∙e∙s enseignant∙e∙s sur les dimensions normatives et les enjeux éthiques de leur pratique. Qui plus est, l'éthique appliquée est évidemment une voie privilégiée par laquelle la philosophie sort de l'université : gouvernance, intelligence artificielle, équité, diversité et inclusion, soins de santé et milieux professionnels font face à des enjeux qui la mettent aussi à contribution. Les exemples sont nombreux... En dehors des murs de l'université, qui sont les nouveaux publics de la philosophie, dans les cégeps ou ailleurs, et comment les transforme-t-elle ? La philosophie peut également se développer dans une perspective interdisciplinaire : comment est-elle présente au sein même des sciences et des arts? Que sont devenu∙e∙s les sémiologues, les éthicien∙ne∙s, les artistes-philosophes, les pédagogues, les militant∙e∙s qui, de près ou de loin, se réclament de notre discipline ? Où sont-ils ? Sommes-nous encore capables de les rencontrer ? Quelles collaborations sont- elles possibles dans les cégeps pour la philosophie entre les différents programmes de formation ? Incontestablement, cette interdisciplinarité peut aussi remettre en question la longue histoire de notre discipline et relancer une réflexion nouvelle sur cette dernière. Mais, aujourd'hui, l'interdisciplinarité fait-elle trembler le panthéon de nos grand∙e∙s auteur∙trice∙s ou bien étend-t-elle la portée de leurs réflexions vers des horizons insoupçonnés jusqu'alors ? Saurons-nous être indiscipliné∙e∙s avec notre discipline ? C'est là le défi que nous lancent les autres disciplines. Or, désenclaver la philosophie, ce n'est pas seulement tourner notre regard vers l'extérieur de la discipline, c'est aussi s'interroger sur les limites celle-ci, tout en tournant notre regard vers l'intérieur, à savoir sur nos propres limites : les angles morts de la philosophie et les biais ancrés dans les grands paradigmes propres à la tradition académique. Longtemps, la philosophie a contribué à ériger des murs à travers le monde, pour se protéger d'abord elle-même dans l'enceinte du monde académique, puis pour séparer les peuples, les nations ou les communautés. Rousseau ne voit pas l'intérêt d'éduquer les femmes autant que les hommes, Bergson appelle à faire la guerre à l'Allemagne, Arendt est bien seule face à la barbarie de son époque... la liste serait longue des murs conceptuels érigés par notre tradition. Laissons- les là et tentons de les contourner pour découvrir au-delà de nouveaux territoires et leurs nouvelles questions. C'est dans cet esprit, par exemple, que s'inscrivent notamment des approches décoloniales, féministes, intersectionnelles et autochtones qui visent à remettre en question des canons de la tradition philosophique et réhabiliter des perspectives marginalisées. Osons mettre de l'avant ces thèmes féconds et puisons leur plein potentiel. Enfin, et pour poursuivre notre proposition de décloisonnement, nous vous invitons à expérimenter d'autres formes de communication que la très classique présentation théorique suivie de questions du public. Osez le visuel, cherchez le sonore, piochez dans la grande boîte à outils des arts et de la culture pour proposer du nouveau, de la multiplicité et de l'innovation. Nous vous encourageons à proposer des symposiums pour des constructions collectives, des conférences à deux voix, des interventions ludiques et interactives, des expériences de pensée originales : laissez parler votre créativité! À vous de prendre des risques pour nous proposer des communications vivantes, incarnées et enjouées, et nous ferons de notre mieux pour vous apporter tout le soutien technique nécessaire pour accomplir ces expressions philosophiques nouvelles. La Société de philosophie du Québec invite donc ses membres à contribuer au Congrès annuel en réfléchissant aux différentes manières par lesquelles la philosophie se déploie en dehors du cadre traditionnel de l'académie : vers d'autres publics, d'autres disciplines, d'autres thèmes ou encore d'autres expressions. Les propositions portant sur le thème principal peuvent adopter une approche strictement philosophique ou une méthodologie multidisciplinaire. Les propositions en philosophie portant sur d'autres thèmes (disciplinaires ou interdisciplinaires) sont également sollicitées. Pour rester en cohérence avec notre thème cette année, la priorité sera accordée aux propositions de communications veillant à la parité ou à l'équilibre de genre entre les participant∙e∙s. Par ailleurs, la Société de philosophie du Québec veillera à assurer la variété et le caractère inclusif des propositions retenues pour le Congrès. Enfin, la SPQ tient à soutenir la diversité au sein de la discipline. Nous encourageons et prêterons une attention particulière aux propositions émanant des membres de groupes traditionnellement sous-représentés en philosophie. |
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